La lettre de Umanz : ✍️ À nos pères, ode aux papas
Chers amis de Umanz,
Je voulais, une fois n’est pas coutume parler de nos pères, de notre métier de papa, de nos joies incroyables, de nos peines, de nos impuissances, de nos défaites et de nos imperfections.
Parmi ces textes sélectionnés depuis des années, certains me touchent énormément. J’y ai ajouté mes propres essais. Ceux qui me connaissent savent que j’ai une profonde et incurable nostalgie de l’enfance.
Je pense que certains de ces textes vous parleront comme ils m’ont parlé.
Vous comprendrez à leur lecture que s’il s’agit d’un hommage à nos pères et une méditation sur l’une des plus belles aventures humaines, c’est surtout une ode à nos enfants.
À nos pères
Qu’il est difficile d’écrire sur les pères. Ils ont été l’ombre de nos premiers pas, parfois ils ont eux-mêmes écrit de merveilleuses pages sur l’enfance. Certains ont évoqué avec des mots tendres et beaucoup de pudeur leur émerveillement de père.
A l’occasion de la fête des pères, nous voulions leur rendre hommage dans Umanz :
Après un certain âge tous les pères se ressemblent
Après un certain âge tous les pères se ressemblent, quelque chose en eux s'attendrit, rend les armes, se dépouille de toute carapace. On repense à la frousse qu'ils nous flanquaient gamins quand ils élevaient la voix, nous menaçaient d'une fessée, nous enjoignaient de leur obéir, de ne pas les décevoir, faillir, trahir leur confiance, nous soustraire à leur autorité. Et les voir maintenant si désarmés nous émeut et nous donne l'impression de faire face à une autre personne, sans que parfois il soit possible d'établir un lien.
Olivier Adam, (Peine Perdue)
Papa
C’est fou la force de ce mot. C’est un coup de feu à bout portant avec une balle d’amour dans la bouche. Ça te dit que tu existes comme tu n’as jamais existé pour personne. C’est un appel qui happe le présent pur, il t’avale. Il t’oblige à être ici : ici même, hic. Tu ne sais pas ne pas y répondre, parce que voilà : tu es là, elle est là et son appel jette une passerelle vers toi que tu n’empruntes même pas : elle te traverse de part en part, elle te crée deux bras en plus, des jambes en mieux, un visage et une voix doubles. Un nous. Papa. C’est le premier mot qui sort un jour des lèvres de ton bébé et qui veut dire « lié ». Deux. Fonduensemble. Plus jamais seuls. Ŀ’unique mot absolument plein de la langue.
Alain Damasio (Les Furtifs) . Editions La Volte.
Le Papa a emmené ses enfants au Parc
Il sort tout fripé comme d’une armoire, il marche lentement l’air fatigué, légèrement excédé…Il porte sur son visage à la barbe mal taillée, le poids de la semaine et les excès de la veille.
Il a une trottinette à la main droite et l’Equipe à la gauche. Devant lui les enfants s’égayent, “Regarde devant toi Nina, attention à la dame”. Ce matin, c’est son tour de sortir les enfants.
Il a soigneusement choisi sa parka la plus défraîchie, il a peaufiné son look d’ours mal léché avec son pull et ses baskets du week-end. Les autres papas le regardent d’un air complice. Les mamans d’un air amusé, parfois admiratif. Les mamans aiment les papas au parc.
Arrivé sur le banc, il fait défiler machinalement les infos sur son smartphone puis déplie son journal d’un claquement sec. Il regarde parfois du coin de l’œil les enfants qui jouent. Il ramassera à trois reprises la petite dernière et renverra mollement un ballon.
Vers 11 heures, un soleil radieux pointera le bout de son nez et le papa regardera enfin ses enfants jouer. Un premier sourire éclairera son visage. Il se lèvera alors et ira courir derrière eux en grognant pour entendre leurs rires. Il passera sa main dans leurs cheveux.
Il ne sait pas encore qu’il vit une merveille fugace de l’existence, que le parc n’est pas une case à cocher mais un moment magique. Dans une poignée d’années il passera devant le parc, les installations auront changé, il se souviendra des merveilles.
A 11h20 c’est le temps de rentrer . Aujourd’hui, Il doit ramener le poulet. Le samedi prend une autre saveur…Le papa a emmené ses enfants au parc.
Patrick Kervern
Rien ne m’a jamais fait plus plaisir que d’être débordé par toi
Aujourd’hui c’est ton dernier jour d’école maternelle. Je te regarde et c’est impossible. Où sont passés les plis d’enfance, au cou, aux bras aux jambes ? Où est passé Bukowsky, le hérisson qui sentait si fort et sans lequel tu ne pouvais pas t’endormir ? Où sont tes cheveux comme de la soie, les fossettes sur le dos de ta main, cette odeur suave de lait sur ta nuque ?
Où sont ces heures où ta vie ne tenait qu'à nous. Je me souviens de l’angoisse des biberons que tu ne voulais pas finir, de l'hôpital Robert Debré où tu suffoquais. Je me souviens de la rivière au bord de l’eau et de cette joie phénoménale quand un camion poubelle passait au pied de notre immeuble, avec ses lumières et son barrissement hydraulique. Et maintenant toi, ce dernier jour et ta timidité de petit garçon qui a grandi trop vite. Dans un mois, tu iras en colo pour la première fois. Tu as déjà une amoureuse (avec des lunettes et une frange, comme ta mère, une coïncidence j’imagine). Tu dis trop cool, mégabien, super nul et tu me demandes de laisser tomber mon téléphone quand nous sommes à table. Demain, tu liras l’île au Trésor et Harry Potter. Bientôt, tu apprendras l’anglais et tu joueras aux caps. Tu auras des jobs d'été et des petites copines dans les dunes. Tu voudras faire du skate et avoir un tatouage. Tout sera allé très vite. Tu seras devenu ce que nous étions, en un claquement de doigt. Aujourd'hui, c'est ton dernier jour de maternelle et je mesure comme le temps frappe en traître, comme il est fugitif et certain. Je me rends compte surtout, à te regarder ce matin, que tu seras plus grand, plus beau et plus fort que moi. Et rien ne m’a jamais fait plus plaisir que d'être débordé par toi.
Nicolas Mathieu
“Dans la maison de notre enfance”.
Hommage de Jacques Serres à son père, Michel Serres
« Dans la maison de notre enfance, nous avions un philosophe. Savoir ce qu’est un philosophe n’est pas à la portée des enfants que nous fûmes. Tout ce que nous savions, c’est qu’il ne fallait pas jouer aux Indiens, au ballon à moins de cinquante mètres de son bureau. Notre mère veillait au grain : “Un philosophe se nourrit de silence.” Dans la maison de notre enfance, il y avait le silence et un philosophe… Peu à peu, il a rompu le silence nourricier. Il a développé toutes sortes de langages. Il a parlé à la radio, à la télé. Il a écrit des livres et des livres. Mais nous avons gardé dans notre liaison intime, dans notre cœur, ce philosophe. Nous avons gardé dans notre cœur un philosophe et son silence. En vieillissant, il est devenu de plus en plus généreux, de plus en plus prévenant, de plus en plus partageur, de plus en plus élégant. Et nous, surpris, nous nous sommes rendu compte que dans la maison de notre enfance il y avait maintenant plus qu’un philosophe ! Aujourd’hui, nous avons tous autour de 60 ans. Malgré notre âge, nous sommes ses enfants. Le philosophe a rejoint son silence et nous a laissé la présence d’un père. »
Jacques Serres
Je me souviens de vos petites mains
Pardon de vous avoir ballottés au petit matin comme des fétus de paille
Pardon de vous avoir crié dessus pour que vous finissiez votre chocolat quand vous rêviez de licornes
Pardon de vous avoir habillés à la hâte, fermé vos fermetures éclair en grommelant
Pardon d’avoir été angoissé au moindre bruit de vibreur du mobile dans ma poste de veste
Pardon de ne pas avoir écouté vos questions si curieuses et répondu de travers
Pardon de ne pas m’être retourné quand vous me disiez au revoir de vos petits bras
Pardon de ne pas avoir été le meilleur papa sur le chemin de l’école…
Mais je me souviens de vos petites doigts dans mes mains
Je me souviens de vos tourbillons, de votre liberté et vos sauts désordonnés sur le trottoir
Je me souviens de vos rires en cascade et de vos dialogues étranges et secrets de petits grands
De vos embrassades maladroites les bras en l’air
De vos rires innocents, de vos voix sucrées
De vos mots avant de passer le porche de l’école :
“Au revoir Papa, on est dans ta poche on est dans ton cœur.”
Patrick Kervern
Il fait les voiles pour que le vent...
CÉSAR : Mais s'il veut naviguer, qu'il navigue, bon Dieu ! Qu'il navigue où il voudra, mais pas sur l'eau !
ESCARTEFIGUE : Mais alors, où veux-tu qu'il navigue ?
CÉSAR : Je veux dire : pas sur la mer. Qu'il navigue comme toi, tiens ! sur le Vieux-Port. Ou sur les rivières, ou sur les étangs, ou… et puis nulle part, sacré nom de Dieu ! Est-ce qu'on a besoin de naviguer pour vivre ? Est-ce que M. Panisse navigue ? Non, pas si bête ! Il fait les voiles, lui ! Il fait les voiles pour que le vent emporte les enfants des autres !
Marcel Pagnol (Fanny)
La banquette arrière du bonheur
C’était une présence constante, des bruits, des disputes, des “quand est-ce qu’on arrive ?”, des “rends lui son livre”, des “Il reste des gâteaux ?” des “Tom a encore renversé l’eau”.
Il y avait des rires toujours, des pleurs parfois, des cris souvent, la banquette arrière n’était jamais calme.
Même séparés par des sacs, les disputes étaient fréquentes, les siestes légères, il y avait une barre d’enfant, des boules de vie. C’était le bonheur sur la banquette arrière.
C’était aussi le refuge improbable de papiers de bonbons, de matières indéfinissables collant aux poignées de portes, de foin du cochon d’inde, de BD déchirées et surtout des miettes, des miettes et des miettes.
La banquette arrière a trois vies, le siège bébé, le rehausseur, puis plus de rehausseur…Et puis un jour, vous vous retournez et il n’y a plus personne sur la banquette arrière.
Ce jour là vous vous rendez compte que vous remplaceriez sans aucun état d’âme votre nouvelle banquette arrière rutilante et aseptisée qui sent désespérément le vide et la voiture neuve contre tous les bonbons écrasés, les grappes de rires, les cris et les miettes…
Les miettes de bonheur de la banquette arrière…
Patrick Kervern
3 tweets sinon rien
Comme un lundi
Morituri te salutant
Perplexitweet
Les Screenthoughts de la semaine
La fonction essentielle du Leadership
Deux douleurs, deux solutions
L’univers murmure jusqu’à ce qu’il crie
“Tu n’es pas ton job” par Carl Jung
Un cas très courant est constitué par l'identification dépourvue de toute note d'humour de nombreux hommes avec leur profession et leur titre. Bien entendu, le poste que j'occupe est mien dans la mesure où s'y insère l'essentiel de mon activité, mais ce poste, cette fonction, cette profession est aussi en même temps l'expression collective de facteurs nombreux, expression qui est née historiquement de la collaboration d'un grand nombre et d'une concordance de circonstances.
Sa dignité est le fruit d'une approbation collective. Dès lors, en m'identifiant à mon emploi ou à mon titre, je me comporte comme si j'étais moi-même toute cette fonction sociale complexe, ce fonctionnement structuré qu'on appelle « un poste », comme si j'étais non seulement le titulaire du poste, mais aussi et en même temps la nécessité sociale et l'approbation collective de la société sur lesquelles il se fonde, qui le sous tendent et l'arc-boutent.
Carl Jung, Dialectique du moi et de l'inconscient
Les pépites de la semaine
Voici pour finir quelques pépites sélectionnées parmi les Newsletters personnalisées réalisées pour nos clients :
🖼️Looking Glass vient-elle d'inventer le GIF du futur ?
🛩️ Le fondateur d'Oculus est devenu un milliardaire de la Défense Tech
🏢 Qui n’a pas son “Digital Headquarter” ?
🤳 Xiaohongshu, plongée en profondeur dans l'Instagram Chinois
🎓 L’influençarisation du monde. Au secours, l’influencer culture se répand partout, même dans les milieux académiques.
C’est tout pour cette semaine, je vous retrouve la semaine prochaine avec de nouvelles pépites de sens. Je vous souhaite un week-end plein de saveurs d’enfance et, comme toujours, gardez le cap.
Cette newsletter est avant tout un projet de cœur. De nombreuses personnes et sociétés nous demandent souvent : comment travailler ensemble ? Sachez que nous réalisons des carnets de tendances annuels (réservez votre session dès maintenant), des newsletters sectorielles, ainsi que de nombreux ateliers : curiosité, esprit du débutant, émerveillement etc. Ainsi que des conférences et séminaires exclusifs pour les comités de direction.
Nous avons également une activité de conseil en positionnement et en identité d’entreprise et réalisons des contenus aussi différenciés que “des guitaristes punk dans un orchestre de mariachis” pour les entreprises, les professionnels et les marques. N’hésitez pas à nous solliciter.