La lettre de Umanz : 🖋️Effacer l'apocalypse ? Plongée dans le SolarPunk
Quand on me demande ce que je fais, une autre façon de décrire mon métier est : collectionneur de nuances.
Un métier à réinventer chaque jour car l’accélération des temps que nous vivons est aussi celle de la simplification. Simplification des réponses, des arguments, des indignations. On nous apprend la semaine dernière que les fake news sont 6 fois plus cliquées sur Facebook #CQFD.
En cette rentrée complexe, la nuance - invisible préalable du sens - est certainement devenue la dernière rareté. C’est aussi pour cela que chaque semaine je passe mon temps à recueillir de belles nuances comme des oiseaux blessés, parmi lesquelles ce texte essentiel de Seth Godin :
C’est facile de lancer une émeute difficile de créer une histoire
Donner aux gens ce qu’ils veulent est loin d’être aussi puissant que leur enseigner ce dont ils ont besoin. Il y a toujours un raccourci disponible, une façon d’être un tout petit peu plus ironique, moins raffiné, plus instantanément compréhensible. Il y a là l’opportunité d’être diverti et distrait quel qu’en soit le coût. Par dessus tout, il y a cette tentation d’encourager les gens à être égoïstes, craintifs et en colère.
Ou alors vous pouvez creuser, prendre votre temps et investir dans un processus qui aide les gens à entrevoir ce dont ils ont réellement besoin. Quand nous faisons évoluer notre culture dans cette direction. Nous faisons un travail digne d’être partagé. Mais cela prend du temps.
Si c’était facile, ce serait déjà fait. C’est facile de lancer une émeute, difficile de créer une histoire qui empêche les gens de déclencher une émeute. Ne dites pas “J’aimerais que les gens aiment cela”. C’est sûr ce serait génial si le marché voulait déjà ce que vous faîtes. Au lieu de cela, imaginez ce qui se passerait si vous pouviez leur apprendre pourquoi.”
Seth Godin
SolarPunk Quesaco ?
“Il reconnaît que les humains ont un impact sur le monde. Mais défend une civilisation qui à la fois façonne le monde qui nous protège avec des mains de jardinier.”
Effacer l’apocalypse : quand le Solarpunk invente de nouveaux narratifs
Difficile de créer une histore ? Et si l’on ravivait l’imaginaire face aux irréversibles c’est ce que propose de faire le SolarPunk une branche fertile de la littérature de science-fiction qui inspire déjà villes et architectes :
“Quelqu’un a dit un jour qu’il est plus facile d’imaginer la fin du monde que d’imaginer la fin du capitalisme. Peut-être est-ce dû à un manque d’imagination.”
Fredric Jameson
Loin des inquiétants et très sombres futurs proposés par le Cyberpunk et le Steampunk, le Solar Punk propose une autre vision d’un futur renouvelable et régénératif.
On attribue généralement la naissance du SolarPunk à un article rédigé sur le blog Republic of the Bees en 2008 articulant une vision de futurs souhaitables et décarbonés, peuplés de cargos à voiles et référençant une première source d’inspiration : un livre de science-fiction de Norman Spinrad “Songs from the stars” (sorti en France en 1980 sous le titre : “Le Chant des étoiles”) un monde dans lequel les énergies sont limitées à quatre grandes sources : l’eau, le soleil, le vent et…les muscles.
Un essai intitulé “Qu’est-ce que le Solar Punk ?” propose la définition suivante :
“Un mouvement écofuturiste qui tente d’éviter les catastrophes en imaginant un avenir dans lequel la plupart des gens aimeraient vivre, plutôt qu’un futur que nous devrions essayer d’éviter.
L’un des sites de référence du mouvement SolarPunk.net s’ouvre ainsi sur cette phrase :
“À la fois une vision de l’avenir, une provocation réfléchie et un mode de vie réalisable. En cours…”
Parallèlement, un manifeste du SolarPunk paru en 2014 se donne la mission suivante :
Notre avenir doit passer par la réutilisation et la création de nouvelles choses à partir de ce que nous avons déjà (en lieu et place du modernisme du 20e siècle “détruisez tout et construisez quelque chose de complètement différent”).
Ni Mad Max Ni Blade Runner
Loin des univers dévastés post-nucléaires, l’esthétique SolarPunk livre des visions inspirantes de villes-forêts, de fermes verticales et de transports écologiques et offre un story-telling et un imaginaire optimiste face aux impasses classiques des récits si difficiles à installer autour du dérèglement climatique.
Dans mon esprit, le Refuturing est lié au rewilding.
Le sentiment de créer de nouveaux futurs immédiats et de repeupler l’espace du futur avec quelque chose d’entièrement divorcé des futurs consensuels précédents.
Warren Ellis (Refuturing)
Dans les termes du spécialiste du Solar Punk, Jay Springett le Solar Punk constitue aussi une machine mimétique une construction culturelle.
Les Solar Punks puisent également leurs inspiration dans les mouvements du logiciel libre et l’éthique du Do-It-Yourself. Des inspirations qui s’incarnent dans l’injonction d’Andrew Dana Hudson : “Bouge et plante des choses.”
L’imaginaire en mode projet
Aujourd’hui on retrouve des expériences inspirées des univers Solarpunk dans les designs inspirants des architectes Stefano Boeri et Vincent Callebaut.
Mais aussi dans des tatouages radicalement inspirés de la nature le moodboard de @missolivialouise Solarpunk mood board et les romans d’anticipation de Claudie Arseneault.
Keisha Howard spécialiste des récits d’anticipation et des futurs spéculatifs sait que les plus grandes inventions trouvent leurs origines dans de grandes œuvres de fictions. Elle admet dans une Keynote TEDx que le SolarPunk reste résolument Punk car il rejette à la fois le Statu Quo et nos habitudes de consommation extractives.
Un mouvement de long-terme
Mais le Solar Punk n’est ni un naïf, ni un optimiste béat. Il sait que le court terme et l’adaptation au changement climatique sera complexe et tragique. Il met cependant son imagination au service d’une meilleur futur car c’est un mouvement résolument orienté vers le long terme.
“Il reconnaît que les humains ont un impact sur le monde. Mais défend une civilisation qui à la fois façonne le monde qui nous protège avec des mains de jardinier.
Notre monde moderne tente de nous orienter vers le court terme et la croissance trimestrielle. Mais dans le monde réel, loin des entrées de trading haute fréquence. Il faut 100 à 120 ans à un chêne pour passer de la graine à une hauteur de la canopée – soit trois générations humaines…
L’après 2150 est le moyen terme.”
conclut Jay Springett.
3 tweets sinon rien
Celui-là (Hey Jude as a Powerpoint), celui-ci (le Street Fight new generation) et celui-là aussi (les mutations du travel).
Souvent la qualité du design tient à la qualité du brief
Le brief pour la première bouteille de Coca-Cola en 1915 disait :
"Une bouteille si distincte qu'elle puisse être reconnue au toucher dans l'obscurité ou lorsqu'elle repose brisée sur le sol."
Les Screenthoughts de la semaine
Les Screenthoughts sont de petites et grandes pensées récoltées ailleurs. Cette semaine :
Le normal n’existe pas
Le talent vs le génie
La pensée peut-être collective
Une larme de nuance encore
L’avocat Jean-Denis Bredin s’est éteint la semaine dernière. Voici ce qu’il disait dans Le Monde en 1995 :
“Le risque détestable serait, pour la démocratie du siècle qui s’approche, qu’un jour le discours de l’intellectuel ne semble plus que pittoresque, et celui du politique indifférent.”
à méditer…
Futur of work = Mental Health, Mental Health, Mental Health…
Voici les 5 grands challenges au travail par niveau de salaire selon Deloitte :
Fatou Diome a deux mots à nous dire
Le chasseur solitaire est le seul à connaître le prix que lui a coûté son gibier.
Fatou Diome
Les pépites de la semaine
Voici quelques pépites extraites des revues de presse effectuées pour nos clients.
🎞️ Le futur de l’animation ? Invisible Universe : quand Pixar rencontre TikTok.
🍊 C’est vrai ça, pourquoi le futur ne serait pas Orange ?
🌳 Le Top 100 Climate Tech c’est par ici
🩳 Les BCBG du futur. l’incroyable retour des Neo-preppies
C’est tout pour cette dense semaine. Bon week-end à tous et surtout…Gardez le cap.
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