La lettre de Umanz : 🥛le pessimisme de l'intelligence et l'optimisme de la volonté
“Il faut allier le pessimisme de l'intelligence à l'optimisme de la volonté.”
Cette puissante phrase de Gramsci serait-elle la plus adaptée à notre ère VUCA ? J’ai souvent été surpris pendant la pandémie par les conversations profondes et déroutantes sur le pessimisme et l’optimisme avec mes amis ou de parfaits inconnus.
Surpris de découvrir que certaines personnes que je trouvais optimistes s’avéraient en fait profondément pessimistes mais comment l’inverse était vrai aussi.
Faites l’essai autour de vous. La conversation optimiste/pessimiste est une conversation dense et le titre de cette lettre résume bien toutes les nuances du spectre optimiste-pessimiste.
Ce spectre et ces nuances qui portent notre regard sur le monde et le futur sont admirablement décrits par Morgan Housel qui nous a autorisé cette semaine à traduire ses réflexions sur le vaste spectre pessimiste-optimiste. Je vous en parle tout de suite.
Dans cette même idée, notre petite méditation rituelle autour des essentiels m’amène cette semaine à partager avec vous ce magnifique texte tout en nuances d’Albert Cohen :
La gaité de résignation
“Vois-tu, la chose importante est celle-ci : tout est simple pour qui possède le bon cœur, la noblesse des manières et la gaieté de résignation. Le devoir est un grand passeport. Sol, regarde le ciel, mon chéri. Qui pourrait être plus arrogant qu’une étoile ? Et pourtant, regarde longtemps les étoiles et tu verras comme elles font honnêtement leur devoir. Aucune ne gêne l’autre, toutes s’aiment, chacune a sa place auprès de son père un soleil, et elles ne se jettent pas toutes au même endroit pour profiter, pour réussir. Mais non, tranquilles, dociles à la Loi, à la Loi Morale, à la Loi du Cœur, elles ont la gaieté de résignation. Et puis pense que tu es mortel et que tu seras poussière. C’est un bon moyen pour augmenter la gaieté de résignation. Tu comprends, on ne souffre que par orgueil et l’homme orgueilleux seul croit qu’il vivra toujours. Moi je me dis que je dois passer cette vie en homme assez bon et pur afin que je puisse goûter le bon sourire d’heure de mort. Et ce bon sourire d’heure de mort a une telle puissance, ô mon fils, qu’il s’étend sur toute notre vie du commencement à la fin et qui le connaît, avant même qu’il ne meure, connaît le royaume du Saint. Et lorsque les hommes auront compris cette vérité, ils seront tous bons.”
Albert Cohen (Solal)
A la Une cette semaine
Le spectre Optimiste- Pessimiste
À une extrémité, vous avez l’optimiste pur et dur. Il pense que tout est génial, le sera toujours, et considère toute négativité comme un défaut de caractère. L’optimisme est en partie lié à l’ego : il a tellement confiance en lui qu’il ne peut imaginer que quelque chose puisse mal tourner.
Il y a ensuite les personnes extrêmement optimistes qui acceptent que de mauvaises choses arrivent parfois à d’autres personnes. Elles lisent les mauvaises nouvelles avec un sentiment de fascination détachée, mais considèrent leur propre avenir comme un parcours sans faute et ne peuvent imaginer autre chose.
Viennent ensuite les optimistes qui sont capables d’être sceptiques face à l’optimisme des autres. Ils considèrent leur avenir comme immaculé, mais possèdent un détecteur de mensonges basse fréquence qui leur permet de détecter si l’optimisme est en fait un argument de vente.
Un échelon plus bas se trouvent les optimistes qui ont une confiance absolue en eux-mêmes mais qui sont tout aussi pessimistes à l’égard des autres. Il est facile de les prendre pour des pessimistes, mais ils considèrent en fait que leur avenir est parfait.
Il existe ensuite une race à part : l’optimiste qui considère que l’avenir de chacun est sombre uniquement parce que certaines choses, ou certaines personnes, font obstacle. Il s’agit de pessimistes qui, autrement, seraient optimistes à propos d’eux-mêmes et de presque toutes les autres personnes. Ils sont malheureux, car un monde parfait semble si proche et pourtant si lointain.
Viennent ensuite les personnes qui sont pessimistes en paroles mais optimistes en actes. Ils sont attirés par le pessimisme car il est intellectuellement séduisant et attire l’attention des gens. Mais leurs investissements sont clairement orientés vers un monde où les choses s’améliorent. De nombreux experts entrent dans cette catégorie.
Au milieu, nous avons ce que j’appelle des optimistes raisonnables : ceux qui reconnaissent que l’histoire est une chaîne constante de problèmes, de déceptions et de revers, mais qui restent optimistes parce qu’ils savent que les revers n’empêchent pas un progrès éventuel. Ils passent pour des hypocrites et des girouettes, mais souvent, ils ne font que regarder plus loin que les autres.
Viennent ensuite les probabilistes. Ils savent que le progrès est probable, mais ils considèrent que tout est une question de chance. “Je ne suis pas un optimiste”, a déclaré un jour Hans Rosling. “Je suis un possibiliste très sérieux”.
Nous arrivons maintenant aux pessimistes refoulés : Ceux qui considèrent le progrès historique comme un coup de chance unique, mais pensent qu’une faible croissance ou une stagnation est plus probable à l’avenir. Ils sont fiers de ce que nous avons accompli, mais doutent que cela puisse continuer.
Plus bas, on trouve les sceptiques. Ils ne contestent pas que le progrès soit possible, voire probable. Mais ils placent la barre si haut pour le prouver que seules les observations a posteriori sont convaincantes – et même dans ce cas, ils se demandent si les données sont exactes ou s’il y a quelque chose d’autre que nous ne voyons pas. Ce sont des gens bien mais qui se torturent dans cette position parce qu’ils savent que le progrès est en train de se produire mais plutôt que d’en profiter, ils se battent pour le nier.
Puis nous arrivons à la première catégorie de vrais pessimistes. Ils savent que le monde va s’améliorer, que les choses vont s’améliorer, que les entreprises vont devenir plus productives – mais ils ne pensent pas qu’ils feront personnellement partie du progrès.
Viennent ensuite ceux qui considèrent que le progrès ne profite qu’à des groupes restreints, tandis que le bien-être de la majorité stagne ou décline car elle est exploitée par un petit groupe de gagnants. (Peut-être le groupe de pessimistes le plus raisonnable).
Un niveau en dessous se trouvent ceux qui espèrent tranquillement le déclin. Ils disent souvent des choses comme “J’espère que mes prévisions ne sont pas justes”, mais rien ne les rend plus heureux que les signes d’une nouvelle récession, d’une crise financière ou d’une hausse de l’inflation.
On arrive bientôt à un véritable pessimisme : les personnes qui pensent que les preuves des progrès passés sont trompeuses, incomplètes ou manipulées pour brosser un tableau rose, et que la réalité est que la vie est aussi dure et inefficace aujourd’hui qu’elle l’a été auparavant et qu’elle le restera à l’avenir.
Viennent ensuite les cyniques, qui considèrent que quiconque promeut le progrès est secrètement motivé par le pouvoir et alimenté par la corruption.
Et enfin viennent les purs pessimistes. Ils pensent que tout est terrible, sera toujours terrible, et voient toute positivité comme un défaut de caractère. L’ego est en partie responsable : ils ont si peu confiance en eux qu’ils ne peuvent imaginer que quelque chose puisse aller bien. Ils sont l’opposé des optimistes purs, et ils sont tout aussi détachés de la réalité.
Cet essai écrit originellement sur le site du Collaborative Fund a été publié sur Umanz avec l’aimable autorisation de son auteur Morgan Housel. Qu’il en soit infiniment remercié.
3 Tweets sinon rien
Celui-là (le -vrai- paradoxe des Bio Twitters). Celui-ci (🙏 pour l’expression du siècle" : “le chewing-gum des yeux”) et celui-là aussi ( les -vrais- stades de maturité d’une industrie).
Pas mal
Découvert chez Rex Woodburry, ce croquis a en fait été réalisé en 1930 pour la marque de margarine allemande Echte Wagner et republié dans le célèbre magazine de Comics US Science-Fiction de l’époque, Amazing Stories, dirigé par Hugo Gernsback.
Les ScreenThoughts de la semaine
Les Screenthoughts sont de petites ou grandes pensées capturées au fil de nos lectures
Le “normal” n’existe pas
Le “négatif” est un confort
Le génie VS le talent
Harold Craxton a deux mots à nous dire
Muy Interesting
Pour finir la semaine, une petite sélection de pépites extraites des revue de presse thématiques réalisées pour nos clients :
👃🏻 Nose-Tech : sentez pour voir…
💡 Venture Buyout (VBO) : Un nouveau modèle d’innovation interne en entreprise ?
🎸Peak Pop Culture : “Après avoir vendu la guitare de Kurt Cobain pour plus de 6 millions de dollars l'année dernière, nous avons eu des acheteurs qui voulaient le gilet que nous avons vendu pour 334 000 dollars", explique Darren Julien.” Quand la Pop Culture bouleverse les enchères.
⚗️ “Fallait pas l’inventer”…Il y a donc des Nootropics pour Gamers.
🌍 Un article profond qui déconstruit nos errements psychologiques, économiques et politiques. Pourquoi n’avons nous pas (encore) réussi à répondre au dérèglement climatique ?
C’est tout pour cette semaine, je vous retrouve la semaine prochaine avec d’autres nuances muy interesting. Bon week-end et d’ici-là, gardez le cap.
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