On a tellement besoin de mystère…
Bon, bien sûr, depuis la création de Umanz je suis entouré d’une banque de doux dingues, de veritables geeks des mots.
L’année dernière ils ont accueilli à bras ouverts mon concept de “Phrases de Presque” ces phrases mystérieuses et magnifiques, pas forcément compréhensibles au premier abord, mais qui creusent un long trou en vous.
Des phrases en forme de joins-les-points.
Pour eux, et pour tous les gens longs que cette idée intrigue ou caresse, je reviens avec une seconde édition des phrases de presque (merci à tous ceux qui m’en ont envoyé).
Ces phrases ont un secret : souvent il nous appartient de les compléter. Ce sont des phrases à haute intensité psychique. Des phrases qui comme un lent ruisseau créent, naturellement, un espace entre les choses.
J’espère qu’elles trouveront ce chemin en vous qui est, peut-être, celui de la mythique “Route non prise” de Robert Frost
“J’étais au milieu de la forêt, il y avait deux chemins devant moi, j’ai pris celui qui était le moins fréquenté, et cela a fait toute la différence.”
Je vous en souhaite, non pas une simple lecture, mais une méditation intrigante.
Les Phrases de Presque II
À l’ère des réponses automatisées et de l’autocomplete, les “phrases de presque” viennent combler un manque en créant un vide.
En ressuscitant cette part de mystère, cet espace entre les choses auquel tout âme aspire.
Lors d’une conférence de presse donnée à l’occasion de la sortie du film The Brutalist, le réalisateur Brady Corbet a révélé en quelques mots ce qui fait l’essence des phrases de presque :
« J’aime tout ce qui fait que le sentiment du spectateur reste perpétuellement irrésolu. Je pense qu'il y a trop de films, trop d'architectures qui arrivent à une conclusion connue d'avance et qui ne continuent pas à évoluer dans votre espace mental ».
Il y a des mots qui cherchent à provoquer une expérience linguistique : chaque phrase est une énigme, chaque mot un nœud de sens.
Ces mots murmurent que le centre est trop brûlant pour être atteint de front.
Les phrases de presque dont j’ai inauguré la première édition l’année dernière sont des charades sacrées que seuls ceux qui ont gardé leur âme d’enfant peuvent comprendre.
Voici donc la deuxième édition des phrases de presque que j’inaugure de cette phrase somptueuse que reconnaîtront les navigateurs :
“Considérer une côte tandis qu'elle défile au long du navire, c'est comme se pencher sur une énigme. Elle est là devant vous, souriante ou hostile, tentante, splendide ou médiocre, insipide ou sauvage, et muette toujours, non sans un air de murmurer : Approche et devine.”
Joseph Conrad, Au coeur des ténèbres
Dans son voyage elle croisera bien sûr les paroles gelées :
"Ils aperçurent en mer une étrange chose. C'étaient des paroles gelées, comme cela arrive souvent dans ces régions froides. [...] On entendit des bruits de voix humaines, mais confus et inintelligibles. Panurge, curieux comme à son habitude, en ramassa quelques-unes. Quand il les réchauffa près du feu, elles fondirent, et l'on entendit des éclats de voix, des cris de bataille, des paroles douces et d'autres effrayantes.”
François Rabelais, Le quart livre
Et elles projetteront tout d’un coup de l’extraordinaire sur le quotidien le plus plat :
“Je viens de quitter Printemps sur le seuil de sa chambre. Il a une psychologie à toute épreuve, mais des mimiques d'enfant trouvé.”
Henri Pichette
Car les phrases de presque dessinent un monde en pointillé, un monde tissé de mystères. Elles nous murmurent qu’elles savent qu’ :
“Il y a un jadis plus puissant que le passé que le langage et la mémoire mettent à disposition.”
Pascal Quignard
Et que parfois…
“La seul façon de dire non est d’avoir un oui plus profond.”
Matthew Kelley
Elles murmurent qu'il est parfois nécessaire de méditer longuement leur portée ésotérique :
“Il y a quelqu’un dont l’absence ne cesse de vous accompagner.”
François Cheng
pour nous faire enfin comprendre que
“L' enfance est une branche de la cartographie.”
Michael Chabon
Alors, elles nous laisseront pénétrer dans leur mystère intime pétri de liberté totale afin de contempler leur vérité folle, celle que dessine Joan Walsh Anglund :
”un oiseau ne chante pas parce qu' il a une réponse, mais parce qu'il a une chanson.”
In fine, les phrases de presque savent que dans toute vie “Il ya des messages dans les crevasses” comme nous le dit Jon Batiste, l’artiste musical le plus intéressant du moment.
Elles savent aussi comme René Char que
"Les mots qui vont surgir savent de nous des choses que nous ignorons d'eux."
Elles savent enfin que certaines phrases ne prennent vraiment leur sens qu’en fonction de l'âme que l'on y met.
Quel sera votre Second Act ?
Il y a des milieux où l’idée même de “page blanche” pour décider sa vie n’existe pas…
Mais sans projet à toi, tu deviens le projet des autres. De tous les autres.
D'autres, qui ont dessiné sur la page que tu laissais vide.
Car ta feuille immaculée est devenue leur espace.
Il y a une gigantesque déconnexion à l'œuvre dans la société. On nous dit qu’il y a une app pour ça, une pilule pour ça, une posture de Yoga pour ça, mais la vérité c’est que nous n’avons pas mis à jour nos outils intérieurs de fabrication du sens et de connaissance de soi, y compris au travail, face à une société et des phases de vie qui ont radicalement changé.
Découvrez Second Act, mon cabinet de transition de vie, un passeport de sérénité pour la deuxième partie de vie.
Découvrez également le Parcours Edge-AWRNSS à destination des Entreprises.
Les Screenthoughts de la semaine
Faire la chose
Peur de l’inconnu ou de la perte du connu
Il y a un autre business que le Show Business
Signe des temps et temps des signes
À suivre : The Artist Corporation une idée neuve pour les artistes par Yancey Strickler le fondateur de Kickstarter.
C’est l’été : il est temps de ressortir mon Manifeste des Introvertis en vacances (il en a sauvé plus d’un.)
Same Same but different. La vacanxieté ne se cache plus.
“Vous et moi sommes des êtres humains, pas des machines. Nous sommes créés, pas manufacturés”. Signal faible n°473 de la tendance #postperf : la tyrannie de l’optimisation
Je médite longuement ceci :
On finit par ça….Hallucination de l’IA ou pas ?
C’est tout pour cette semaine, je vous retrouve la semaine prochaine avec un essai sur ce que les gens longs et les lecteurs de Umanz ont en abondance mais qui manque de plus en plus au reste des gens #teasing.
D’ici là, comme toujours, gardez le cap 🧭.
Waloyo Yamoni, nous surmontons le vent.
Patrick Kervern, défadeur en chef de Umanz
Cette newsletter est avant tout un projet de coeur. De nombreuses personnes et sociétés me demandent souvent : comment travailler ensemble ? Actuellement, je consacre 80% de mon temps à “Second Act”, mon cabinet d’accompagnement en transitions pro ou perso. 10% de mon temps à des Keynotes en entreprise sur les Soft Skills élégants: les secrets de l’audace, la curiosité, l’esprit du débutant, l’émerveillement, l’impact, la loyauté, l’art de la conversation etc. Ainsi que des ateliers et séminaires exclusifs pour les comités de direction. Et 10%, par pur plaisir, à une activité de conseil en positionnement et en identité d’entreprise que j’ai gardée de mes anciennes activités chez Google, Reuters et Dow Jones. Elle me permet de produire, pour les marques et les entreprises des positionnements ou des contenus uniques, aussi différenciés que des guitaristes punks dans un orchestre de mariachis.
Bonjour et merci pour vos lettres du vendredi.
Voici un joli texte à découvrir ou à relire.
Meilleures salutations MO
L'Espérance ne viendra jamais
qu'aux yeux brulés, aux yeux perdus.
L'Espérance ne viendra jamais
qu'à ceux qui ne l'attendaient plus.
Elle viendra le lendemain quand les fleurs seront fanées,
quand les guirlandes en papier seront défraîchies,
quand les décors seront démontés.
Elle ne viendra que le lendemain
quand les costumes seront au placard,
les maquillages démasqués,
quand le rimmel aura coulé,
et quand la scène sera vide.
Elle viendra pieds nus, à tâtons,
comme un boiteux qui se met à danser,
comme un aveugle qui se prend à voir,
comme un sourd qui, d'un seul coup, entend.
L'Espérance viendra
comme un matin frileux,
comme un soleil encore dans son nuage.
Elle entrera,
non par la grande entrée des artistes,
mais par le petit escalier des machinistes.
Elle portera son vêtement des commencements
et ses yeux de poème,
ses deux mains de tous les jours,
ses pleines mains de la réalité.
L'Espérance ne nous apportera pas ce que nous espérions
mais ce que nous n'espérions plus.
Elle viendra comme une étincelle, un enfant prodigue,
au moment que j'attendais le moins.
Sa bouche ne sera qu'une parole,
grande ouverte
comme le tombeau d'un ressuscité.
Jean Debruyne, Les jours au fil des mots,
Editions Presses d’Île de France.
Merci Marie, quel texte ! "Elle portera son vêtement des commencements et ses yeux de poème". 🙏