Umanz by Patrick Kervern

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La lettre de Umanz đŸ–‹ïž: "nous avons besoin de data et nous avons besoin de rĂȘves"
umanz.substack.com

La lettre de Umanz đŸ–‹ïž: "nous avons besoin de data et nous avons besoin de rĂȘves"

Humanités numériques (Partie II)

Patrick Kervern
Nov 26, 2021
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La lettre de Umanz đŸ–‹ïž: "nous avons besoin de data et nous avons besoin de rĂȘves"
umanz.substack.com

"Si vous tombez amoureux d'une machine, il y a un problÚme avec votre vie amoureuse. Si vous vénérez une machine, il y a un problÚme avec votre religion."  nous rappelait Lewis Mumford dans une fulgurance pleine de sens.

AprÚs le premier volet de la semaine précédente, Nous poursuivons cette semaine notre exploration des Humanités Numériques avec 6 textes essentiels éclairant nos fascinations et nos rapports ambigus à la machine.

Avant cela, petite Ă©lĂ©vation d’esprit rituelle avec ce texte saisissant de notre rubrique Essentiels :

Les Yeux de ma mĂšre par Samuel Beckett

En 1948, Samuel Beckett visite sa mÚre atteinte de Parkinson. Il écrit à Georges Duthuit.

«Mon pauvre Georges, ce soir, vous ĂȘtes mal tombĂ©. Il fait beau, je marche dans mes vieux chemins, je guette les yeux de ma mĂšre, jamais si bleus, si stupĂ©faits, si dĂ©chirants d’enfance sans issue, celle de la vieillesse. 

Allons-y plutît un peu plus tît, pendant qu’il est encore des refus à faire. Je crois que ce sont les premiers yeux que je vois vraiment. Je ne tiens pas à en voir d’autres, j’ai là de quoi aimer et pleurer suffisamment, je sais maintenant ce qui va se fermer, et s’ouvrir en moi
”


“Nous avons besoin de data et nous avons besoin de rĂȘves”

Humanités numériques Partie II

"L'aspect le plus triste de la vie aujourd'hui est que la science accumule les connaissances plus vite que la société n'accumule la sagesse."

Isaac Asimov

Devant le succÚs du volet n°1, nous poursuivons notre plongée dans les humanités numériques initiée il y a une semaine en vous proposant de nouveaux textes qui interrogent notre rapport à la technologie, donc au monde.

1- A quoi servent les gens ?

Lorsque je demande : "Ă  quoi servent les gens", je ne pose pas une question de type "Ou bien/ Ou bien". Je nous rappelle plutĂŽt qu'une culture figĂ©e sous le charme des sciences exactes n'est pas du tout une culture. Lorsque nous rĂ©vĂ©rons la technologie et ses solutions par-dessus tout, nous cessons de voir l'agilitĂ© et la nuance qui caractĂ©risent l'intelligence humaine dans ce qu’elle a de meilleur. 

En plaçant la technologie au-dessus de nous, nous cessons de synthétiser des données provenant d'autres sources. Nous passons à cÎté d'une efficacité durable qui provient d'une pensée holistique, et non d'une optimisation.


.À quoi servent les gens ? Les algorithmes peuvent faire beaucoup de choses, mais ils ne prennent pas soin.

Les gens sont faits pour prendre soin.

Christian Madsjberg

2- La machine

Ne pouvez-vous voir, ne pouvez-vous tous voir, vous les conférenciers, que c'est nous qui sommes tous en train de mourir, et qu'ici-bas la seule chose qui vive vraiment, c'est la Machine ? Nous avons créé la machine, pour qu'elle accomplisse notre volonté. Elle nous a volé le sens de l'espace et le sens du toucher, elle a brouillé toute relation humaine et réduit l'amour à un acte charnel, elle a paralysé nos corps et nos volontés, et maintenant, elle nous oblige à la vénérer. La Machine se développe - mais pas selon nos plans. La Machine agit - mais pas selon nos objectifs. Nous ne sommes rien de plus que des globules sanguins circulant dans ses artÚres, et si elle pouvait fonctionner sans nous, elle nous laisserait mourir.

La machine s’arrĂȘte, Edward Forster, 1909.

3- Nous avons besoin de data et nous avons besoin de rĂȘves

“Nous avons besoin de data et nous avons besoin de rĂȘves”

L’une des raisons pour lesquelles plusieurs personnes redoutent les machines est qu’ils s’inquiĂštent d’un monde oĂč l’on peut tout prĂ©dire et rien imaginer.

Et ça ne nous rend pas vraiment humain. En fait, dans ma carriĂšre prĂ©cĂ©dente de psychothĂ©rapeute, nous avions un mot pour dĂ©crire la capacitĂ© de tout prĂ©dire d’aprĂšs les donnĂ©es du passĂ© et oĂč l’imagination Ă©tait incapacitĂ©e, on appelait cela “un traumatisme”...Et c’est une condition trĂšs dĂ©shumanisante.

Bien sĂ»r nous avons besoin de data mais nous avons besoin de rĂȘve. Nous avons besoin d’outils et nous avons besoin d’histoire. Mais ce que je voudrais vous proposer c’est ce que l’on caractĂ©rise aujourd’hui comme tension entre l’humanitĂ© et la technologie n’est que l’instantiation du XXIĂšme siĂšcle de cette tension Ă©ternelle entre le dĂ©sir de la data et des outils pour rendre la vie meilleure et des histoires et des rĂȘves qui nous permettent d’avoir une vie qui fait sens.

DĂšs lors si nous voulons apprendre mieux, nous devons amĂ©liorer notre capacitĂ© Ă  faire les deux. SpĂ©cifiquement nous avons besoin d’apprendre Ă  faire un travail qui fait sens. Si nous ne nous concentrons que sur un type d’apprentissage : celui qui nous permet de prĂ©dire, ou prĂ©venir ou nous adapter au futur, le problĂšme ne sera pas les machines qui viendront mais les machines que nous deviendront
”

Gianpiero Petriglieri, Conférence Learning for Human Living.

4- Est-ce que nous fixons les rĂšgles de la technologie ?

En tant que ChanceliĂšre fĂ©dĂ©rale, je dois souvent me poser la question : Est-ce que je fais ce qu'il faut ? Est-ce que je fais quelque chose parce que c'est bien, ou simplement parce que c'est possible ? Vous devriez vous le demander encore et encore - et c'est la troisiĂšme pensĂ©e que je vous adresse aujourd'hui : est-ce que nous fixons les rĂšgles de la technologie ou est-ce que la technologie dĂ©termine la façon dont nous interagissons ? Nous concentrons-nous sur l'ĂȘtre humain dans sa dignitĂ© sous toutes ses facettes, ou ne voyons-nous que le client, la source de donnĂ©es, l'objet de la surveillance ?

Angela Merkel, Discours Ă  Harvard

5- Discrétiser

L’humain, sans cesse, donne forme au rĂ©el, c’est-Ă -dire qu’il l’édite, qu’il fait un montage plus ou moins sensĂ© et personnel Ă  partir de la soupe disparate de l’ĂȘtre. Seulement, la sociĂ©tĂ© de consommation numĂ©rique, par son goĂ»t de la saturation et sa peur du vide perçu Ă  tort comme identique au rien, tend Ă  transformer ses sujets en spectateurs remastĂ©risĂ©s, assujettis Ă  un excĂšs d’informations, le cerveau comprimĂ© par d’incessants stimuli binaires, comme des oies que l’on gave, plutĂŽt qu’assemblant activement des Ă©lĂ©ments hĂ©tĂ©rogĂšnes et distincts pour tenter d’en faire un monde.

Le cyberespace, si nous dĂ©lĂ©guons notre imaginaire au pur numĂ©risme, deviendra effectivement un vaste amas d’appartements solitaires oĂč chacun de nous se croira magicien parce qu’il sera entourĂ© de machines habiles Ă  « reproduire le rĂ©el » sans autre participation que celle d’appuyer sur une touche, Ă  la façon d’un rat entraĂźnĂ© Ă  se nourrir en actionnant une manivelle. En informatique, transformer une rĂ©alitĂ© en ordre binaire et codĂ© se dit « discrĂ©tiser ». Et en effet, on peut dire que le risque du tout numĂ©rique est de rendre l’humain trĂšs discret


Luis Miranda, L'Art d'ĂȘtre libres au temps des automates

6- Et le monde a commencé à mordre

“La technologie se manifeste de maniĂšre trĂšs diffĂ©rente selon les endroits. Pas seulement un peu, mais beaucoup, c'est-Ă -dire que nous sommes dans un tout nouvel espace temps.

Lorsque le software a commencĂ© Ă  manger le monde, le monde a commencĂ© Ă  mordre. Parce qu'il s'avĂšre que les soi-disant "valeurs universelles" codĂ©es en dur dans les plates-formes technologiques construites en Californie ne sont pas si universelles aprĂšs tout.”

Sophie Schmidt, (a letter from our founder- Rest of World)


3 tweets sinon rien

Celui-lĂ  (Miel Armstrong), celui-ci (c’est pourtant simple l’expĂ©rience client), et celui -lĂ  aussi (connaissez vous le squircle ?)


Les Screenthoughts de la semaine

Les marques VS les produits

La vérité sur les mariages

C’est quoi un “Love Product” ?


Le graphique qui a bien vieilli

Futur du travail : aprĂšs les tranches de salaires, les tranches d'API


La pub qui a mal vieilli

(Source, The Guardian : “The forgotten Oil Ads that told us climate change was nothing”).

Et un peu de (Christian) Bobin dans un monde de brutes

“J'ai toujours mille choses Ă  te dire, et me vient en tĂȘte, dans l'eau, sous le soleil, cette dĂ©finition de toi, sachant que tu Ă©chappes Ă  toute dĂ©finition, je te dis, tu veux savoir qui tu es pour moi, eh bien voilĂ  : tu es celle qui m'empĂȘche de me suffire.”

Christian Bobin. La plus que vive (1995).


Les pépites de la semaine

đŸ•č Le Web3 ouvre une guerre culturelle dans le monde du gaming

❔ Reddit est le nouvel Agora philosophique avec une question essentielle 

🧀 Et le meilleur fromage du monde en 2021 est
.

🚾 Comment vont les enfants des “One percenters” ? Spoiler : mal.

đŸ›ïž Couche-tard : anatomie des “Bedtime Procastinators”

C’est tout pour la lettre de Umanz cette semaine. Excellent week-end à tous et comme toujours, gardez le cap;

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