La lettre de Umanz : ✍️ Status Safeguarding Quesaco ?
Bienvenue sur Umanz, une lettre où un non-automate parle à des intelligences naturelles.
Dans un texte célèbre, GianPiero Petriglieri, professeur à l’INSEAD s'inquiétait non pas des machines qui viendront mais des machines que nous deviendront.
Après la collection de nuances de la semaine dernière, je voulais vous parler aujourd’hui d’un phénomène que j’observe de plus en plus souvent autour de moi.
Un dévoiement de l’éducation dont je ne savais qu’il avait un nom : le Status Safeguarding.
Avant de vous l’exposer, je voulais vous évoquer, a contrario, une vision de l’éducation qui n’a pas pris une ride, et qui reste à multiples égards, une aspiration. C’est celle que proposait Marguerite Yourcenar en 1980 et c’est le texte méditatif que je vous propose aujourd'hui pour ouvrir la lettre de Umanz :
« Je condamne l’ignorance qui règne en ce moment dans les démocraties aussi bien que dans les régimes totalitaires. Cette ignorance est si forte, souvent si totale, qu’on la dirait voulue par le système, sinon par le régime. J’ai souvent réfléchi à ce que pourrait être l’éducation de l’enfant. Je pense qu’il faudrait des études de base, très simples, où l’enfant apprendrait qu’il existe au sein de l’univers, sur une planète dont il devra plus tard ménager les ressources, qu’il dépend de l’air, de l’eau, de tous les êtres vivants, et que la moindre erreur ou la moindre violence risque de tout détruire.
Il apprendrait que les hommes se sont entretués dans des guerres qui n’ont jamais fait que produire d’autres guerres, et que chaque pays arrange son histoire, mensongèrement, de façon à flatter son orgueil.
On lui apprendrait assez du passé pour qu’il se sente relié aux hommes qui l’ont précédé, pour qu’il les admire là où ils méritent de l’être, sans s’en faire des idoles, non plus que du présent ou d’un hypothétique avenir.
On essaierait de le familiariser à la fois avec les livres et les choses ; il saurait le nom des plantes, il connaîtrait les animaux sans se livrer aux hideuses vivisections imposées aux enfants et aux très jeunes adolescents sous prétexte de biologie ; il apprendrait à donner les premiers soins aux blessés ; son éducation sexuelle comprendrait la présence à un accouchement, son éducation mentale la vue des grands malades et des morts.
On lui donnerait aussi les simples notions de morale sans laquelle la vie en société est impossible, instruction que les écoles élémentaires et moyennes n’osent plus donner dans ce pays.
En matière de religion, on ne lui imposerait aucune pratique ou aucun dogme, mais on lui dirait quelque chose de toutes les grandes religions du monde, et surtout de celle du pays où il se trouve, pour éveiller en lui le respect et détruire d’avance certains odieux préjugés.
On lui apprendrait à aimer le travail quand le travail est utile, et à ne pas se laisser prendre à l’imposture publicitaire, en commençant par celle qui lui vante des friandises plus ou moins frelatées, en lui préparant des caries et des diabètes futurs.
Il y a certainement un moyen de parler aux enfants de choses véritablement importantes plus tôt qu’on ne le fait. »
Marguerite Yourcenar (les yeux ouverts-1980)
Status Safeguarding Quesaco ?
Qu’est-ce que le Status Safeguarding ? C’est un étrange phénomène mis à jour par Melissa Milkie, une sociologue Canadienne. Il traduit “ le travail vigilant des mères pour arranger le parcours de leur enfant vers le plus haut statut social et économique afin de de leur ménager un filet de sécurité individualisé.”
Le Status Safeguarding que l’on pourrait traduire par la sécurisation du statut semble ces dernières années devenu un dérivé de plus en plus visible de l’helicopter parenting (lire nos enfants ne sont pas des startups voire de sa dégradation sublimée, il y a quelques années, chez les Parents Chasse Neige (SnowPlough Parents).
Du premier de la classe au premier de la place de marché
Concrètement, le Status Safeguarding s’exprime de manière de plus en plus visible chez les mères vivant par procuration “l’insertion de leur enfant sur les places de marché d’aujourd’hui.”
Selon Melissa Milkie, le Status Safeguarding serait un dérivé toxique de l’idée reçue que les mères savent instinctivement ce qui est le mieux pour leur enfant. Un sorte de croisement hybride entre l’Intensive Mothering décrit par Sharon Hays dans les années 90 et de la course du rat reproductive au sens de Bourdieu.
Ses conséquences : une vision millimétrée et intensive des journées scolaires et relationnelles de leurs enfants en adjoignant au père le rôle de complice.
Dans ses formes extrêmes, l’acte même de Status Safeguarding performatif détourne les mères d’un investissement assidu dans leurs propres carrières.
Les mères angoissées par le Satus Safeguarding vont alors procéder à une customisation intense du monde enfantin de leur progéniture avec une vigilance d’autant plus féroce que l’environnement économique est précaire…Un exercice périlleux et à haute charge émotionnelle et mentale étant donné l’incertitude des résultats.
L’enfant : de produit d’épargne à produit spéculatif
Prises dans le tourbillon du Status Safeguarding, les mères posent des options sur des enfants qui deviennent ainsi un produit hautement spéculatif à hedger. Et ce “travail urgent, sacrificiel, protecteur” de reproduction sociale finit souvent par se crasher sur l’injonction capitaliste de la poursuite de carrière au féminin.
Le status safeguarding s’excerce dans trois domaines spécifiques : le domaine scolaire et parascolaire, le développement des talents sportifs ou artistiques (cf. la Tiger Mum, Amy Chua) et enfin, le développement émotionnel qui s’accompagne aujourd’hui de nombreuses visites chez le psy face à la dégradation croissante de la santé mentale des jeunes générations.
Le but final : épargner et sécuriser ce que Melissie Milkie nomme le “Competitive Kid Capital”
Bien sûr, le Status Safeguarding a plusieurs effets secondaires. La pression éducative et sociale peut amener les parents à détourner des enfants de leur passion pour des matières plus compétitives ou de ne jamais les laisser s’ennuyer pour, in fine, perdre, par habitude du soutien maternel, toute autonomie.
Mais le phénomène du Status Safeguarding, sorte de peur de l’échec par procuration, n’est pas prêt de s’éteindre. Il aurait même tendance à s’accentuer au fur et à mesure que les études s’allongent et que la rentrée dans la vie active des enfants se retarde.
Et il va parfois même au-delà…Aux US, 1 parent sur 5 accompagnerait son enfant à son premier entretien de recrutement.
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La vérité sur le deuxième partie de vie
"Nous ne pouvons pas vivre l'après-midi de la vie selon le programme du matin, car ce qui était grand le matin sera petit le soir, et ce qui était vrai le matin sera devenu un mensonge le soir.”
Carl Jung
Il y a une gigantesque déconnexion à l'œuvre dans la société. On nous dit qu’il y a une app pour ça, une pilule pour ça, une posture de Yoga pour ça, mais la vérité c’est que nous n’avons pas mis à jour nos outils intérieurs de fabrication du sens face à une société qui a radicalement changé.
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C’est tout pour cette semaine, je vous retrouve la semaine prochaine avec le retour des Idées Qui Murmurent.
D’ici là, gardez le cap 🧭.
Waloyo Yamoni, nous surmontons le vent.
Cette newsletter est avant tout un projet de cœur. De nombreuses personnes et sociétés nous demandent souvent : comment travailler ensemble ? Sachez qu’en dehors de “Second Act”, mon cabinet de transition de vie je réalise des carnets de tendances annuels (réservez votre session dès maintenant), des newsletters sectorielles, ainsi que de nombreuses Keynotes en entreprise sur les Soft Skills élégants: la Curiosité, l’esprit du débutant, l’émerveillement, l’impact, la loyauté, l’art de la conversation etc. Ainsi que des ateliers et séminaires exclusifs pour les comités de direction.
J’ai également une activité de conseil en positionnement et en identité d’entreprise. Elle me permet de produire des contenus aussi différenciés que “des guitaristes punks dans un orchestre de mariachis” pour les entreprises, les professionnels et les marques. N’hésitez pas à me solliciter.