J’écris depuis un an sur une tendance émergente que je vois se manifester de manière de plus en plus visible la tendance #postperf.
J’ai même régulièrement des conversations intenses et nuancées avec un CFO à ce sujet (si si…)
Dernier avatar de cette tendance salutaire, l’Analog Wellness gagne du terrain. J’y consacre la lettre de Umanz de cette semaine car elle m’apparaît comme une tendance durable, dans tous les sens du terme.
Elle prolonge une conversation continue que j’ai en famille ou au travail sur les vertus de l’inutilité dans un monde où l’injonction de performance issue de l’hyperfinanciarisation du monde apparaît de plus en plus pour ce qu’elle est, une injonction toxique dont on mesure de mieux en mieux l’effet sur les esprits et la planète.
Avant de partager l’essai sur l’Analog Wellness, je voudrais, il faut des rites, partager ces deux petites méditations sur l’inutilité.
Bonnes lectures :
“Je pense que l’on devrait avoir juste l’efficacité de marché qu’il est nécessaire. Car chaque chose de valeur dans la la vie humaine se situe dans le royaume de l'inefficacité : l’amour, la famille, le lien, la communauté, la culture, les vieilles habitudes, les chaussures confortables”
Edward Luttwak
« Regardez les gens courir affairés, dans les rues. Ils ne regardent ni à droite, ni à gauche, l’air préoccupé, les yeux fixés à terre, comme des chiens. Ils foncent tout droit, mais toujours sans regarder devant eux, car ils font le trajet, connu à l’avance, machinalement. Dans toutes les grandes villes du monde c’est pareil.
L’homme moderne, universel, c’est l’homme pressé, il n’a pas le temps, il est prisonnier de la nécessité, il ne comprend pas qu’une chose puisse ne pas être utile; il ne comprend pas non plus que, dans le fond, c’est l’utile qui peut être un poids inutile, accablant.
Si on ne comprend pas l’utilité de l’inutile, l’inutilité de l’utile, on ne comprend pas l’art; et un pays où l’on ne comprend pas l’art est un pays d’esclaves et de robots, un pays de gens malheureux, de gens qui ne rient pas ni ne sourient, un pays sans esprit; où il n’y a pas l’humour. Où il n’y a pas le rire, il y a la colère et la haine.”
Eugène Ionesco
Analog Wellness, quesaco ?
Un jour il fallut nommer les plaisirs simples…
Cela devait arriver. Après le succès du NOMO, les erreurs, les passages en force et les produits dégradés des evil twins Zuck & Musk, un brin de nostalgie déclenchée par les soirées “sans enjeux” des années en 1990 et l’intense besoin d’hyperphysicalité post-covid, il était naturel que tout ce qui est analogique devienne rare, premium et désirable.
La tendance Analog Wellness a été consacrée tendance n°1 lors du Global Wellness Summit au point que sa vice-présidente Research Beth McGroarty, a baptisé 2025, l’année de “La grande déconnexion”.
34% des membres de la GenZ ont quitté les réseaux sociaux et 62% seraient prêts à en limiter l’usage. Il semblerait que les jeunes générations digital natives perçoivent désormais avec une acuité quasi-physique les mécanismes invisibles de l’addiction algorithmique et les rejettent désormais en masse.
“Je ressens cette sensation de manipulation… cette impression d’addiction avec Internet, le fait qu’il ait pris le contrôle de nos vies", ajoute Beth McGroarty. "Il y a une rébellion bien plus forte contre cela.”
Au point de l’indigestion ? Selon elle, nous ingérons 74 Gigabytes d’information chaque jour. L’équivalent de qu’un adulte absorbait il y a 500 ans…dans toute une vie.
Le besoin d’un bouton pause, physique et métaphysique
Nous sommes littéralement en Burn Out Digital, ce qui explique en partie la nostalgie analogique qui fait le succès du Reddit R/Nostalgia, des soirées We are the 90’s dans les grandes capitales ou des milliers de vidéos TikTok expliquant comment faire une soirée des années 90 ou recréer des anniversaires “comme dans les années 1990” sans oublier la redécouverte inattendue de l’Otium.
En bref, la nostalgie “No phones, just vibes” d’une époque où “les gens se regardaient encore dans les yeux.” Une Hard Nostalgia, qui fait renaître toute une coterie de produits analog friendly comme les dumbfones, les flip phones, les cassettes, les vinyles ou les Tamagotchis.
La montée en puissance de l’Analog Wellness parle aussi d’un désir de découper le temps en tranches physiques, avoir une séparation plus nette entre la vie de bureau et la vie privée alors que les mêmes apps nous gluent dans le même continuum.
Un rejet de la greffe algorithmique
En bref, toute une génération casse de nouveau les codes, comprend que sa vie n’est pas un KPI ou un mix de comportements destinés à alimenter en data les machines à outrance -et à faire consommer- que sont devenus la plupart des réseaux sociaux.
L’analog wellness est intrinsèquement liée à la tendance #PostPerf dont je vous parle depuis des mois (cf. Wasting time as a Status Symbol). Elle révèle aussi cette aspiration salutaire à retrouver les chemins d’une joie plus naturelle et non performative.
In fine, l’Analog Wellness aux côtés du mouvement dé-influenceurs est un signal faible et une réaction de rejet d’une génération dotée d’une protection naturelle et instinctive contre tout ce qui vient artificiellement exciter les amygdales et ouvrir à coup de hache les vannes de cortisol. L’acte punk est désormais d'ouvrir un livre dans le métro.
C'est à fois une révolte lucide face aux ravages de la dé-réalisation, un regret du Joy-of-being-human C’est aussi une aspiration puissante à surgir que l’on retrouve dans “make something heavy” d’Anu Atluru.
Élevée aux a vupps, aux nudges, et à la gamification, consciente des pactes faustiens du venture Labor, les nouvelles cohortes semblent de plus en plus immunisées face aux Dark Patterns.
Une nouvelle génération éclairée casse de nouveau les codes et se déclare prête à “laisser les agents AI consommer le Slop AI, acheter pour nous mais surtout nous laisser revenir à la nature et au vrai.”
Un rejet naturel de la greffe algorithmique en quelque sorte.
Quel sera votre Second Act ?
“Dans un monde de followers, Tu suis mais tu n’es pas.”
Il y a une gigantesque déconnexion à l'œuvre dans la société. On nous dit qu’il y a une app pour ça, une pilule pour ça, une posture de Yoga pour ça, mais la vérité c’est que nous n’avons pas mis à jour nos outils intérieurs de fabrication du sens et de connaissance de soi, y compris au travail, face à une société ou des phases de vie qui ont radicalement changé.
Découvrez Second Act, mon cabinet de transition de vie, un passeport de sérénité pour la deuxième partie de vie.
Les Screenthoughts de la semaine
Le travail de rêve du samedi matin
Vivre en théorie
L'âge de la création
Signe des temps et temps des signes
Selon ce rapport : depuis l’AI summary view, Google enverrait 96% de trafic en moins sur les sites.
Une nuance pas inintéressante. Eustress VS Distress
C’est (pas si) nouveau ça vient de (re)sortir ? Pretty Privilege Quesaco ?
Mon ami Mathieu Roumens, qui a tout compris de l' Analog Wellness, lance Saywot, sa radio nouvelle génération.
Panique dans l’élite de la PMC (Professional Managérial Class). L’arrivée de l’AI crée des remous et de nouvelles cadences infernales chez les MBB (McKinsey, Bain, BCG).
C’est tout pour cette semaine, je vous retrouve la semaine prochaine avec une micro-fiction (si,si). D’ici là, comme toujours, gardez le cap.
Waloyo Yamoni, nous surmontons le vent.
Cette newsletter est avant tout un projet de cœur. De nombreuses personnes et sociétés me demandent souvent : comment travailler ensemble ? Actuellement, je consacre 80% de mon temps à “Second Act”, mon cabinet d’accompagnement en transitions pro ou perso. 10% de mon temps à des Keynotes en entreprise sur les Soft Skills élégants: la Curiosité, l’esprit du débutant, l’émerveillement, l’impact, la loyauté, l’art de la conversation etc. Ainsi que des ateliers et séminaires exclusifs pour les comités de direction. Et 10%, par pur plaisir, à une activité de conseil en positionnement et en identité d’entreprise que j’ai gardée de mes anciennes activités chez Google, Reuters et Dow Jones. Elle me permet de produire des contenus uniques, aussi différenciés que des guitaristes punks dans un orchestre de mariachis.
Merci. Très belle livraison de cette lettre-cadeau
Mikaël