"Il est si difficile d'oublier la douleur, mais il est encore plus difficile de se souvenir de la douceur. Nous n'avons pas de cicatrice à montrer pour le bonheur. Nous apprenons si peu de la paix."
Chuck Palahniuk
Je crois qu’il y a certains textes aux vertus tactiles. Certains textes qui vous caressent doucement et répandent sur vous comme une poudre de fée.
Pendant un moment, vous vous tenez à l’écart du monde, les yeux vers le ciel. Dans ce temps suspendu, cet espace entre les choses.
C’est cet espace de rêverie et d’imagination que la modernité liquide a pulvérisé. Mais c’est de cet espace dont on me parle de plus en plus, comme d’un manque physique, comme une nostalgie dans mon Cabinet Second Act.
Les bouchées contemplatives reviennent cette semaine dans la lettre de Umanz pour nous rappeler que la douceur et la beauté sont bien plus indispensables à nos vies que l’outrance algorithmisée, et que, parfois, savoir habiter le monde poétiquement est la dernière bouée qui nous reste pour rester dignes. Pour ne jamais oublier la légèreté.
Les bouchées contemplatives sont des fragments d’ébloui.
C’est pourquoi je dédie à tous les gens longs, à tous ceux que la tentation de l’estrangement taraude, ces quelques phrases sublimes de Maurice Blanchot :
Presque rien ne le distinguait des autres,
A la vérité, presque rien ne le distinguait des autres. Il était plus effacé, mais non pas modeste, impérieux quand il ne parlait pas ; il fallait alors lui prêter silencieusement des pensées qu'il rejetait doucement ; cela se lisait dans ses yeux qui nous interrogeaient avec surprise, avec détresse : pourquoi ne pensez-vous que cela ? pourquoi ne pouvez-vous pas m'aider ? Ses yeux étaient clairs, d'une clarté d'argent, et faisaient songer à des yeux d'enfant. Il y avait, du reste, sur son visage quelque chose d'enfantin, expression qui nous invitait à des égards, mais aussi à un vague sentiment de protection.
Certainement il parlait peu, mais son silence passait souvent inaperçu. Je croyais à une sorte de discrétion, parfois à un peu de mépris, parfois à un trop grand recul en lui-même ou hors de nous. Je pense aujourd'hui que peut-être il n'existait pas toujours ou bien qu'il n'existait pas encore. Mais je songe à quelque chose de plus extraordinaire : qu'il avait une simplicité dont nous n'étions pas surpris.
Il gênait pourtant. Il m'a gêné plus que d'autres. Peut-être a-t-il changé la condition de tous, peut-être seulement la mienne. Peut-être fut-il le plus inutile, le plus superflu de tous les êtres.
Maurice Blanchot, le dernier homme
Peine oblique, beauté solide et trois autres bouchées contemplatives
Peine oblique
Le journal m'apprend sa mort. Je ne l'avais rencontré qu'une fois, il y a longtemps, et en oblique. Alors pourquoi cette légère peine ? Peut-être parce que personne ne nous est indifférent et que chacun de ceux que nous croisons entre à notre insu dans notre cœur pour s'y faire une chambre, même modeste, dans les combles où nous ne pensons pas souvent à monter.
Notre cœur est plus grand seigneur que nous.
On parle à des gens et tout à coup ils ne sont plus là : on reste avec nos paroles coupées comme une jambe ou un bras.
Christian Bobin
L’Italie est un sentiment
Mais pourquoi ? lui ai-je demandé. Pourquoi nous serait-il interdit de revenir en Italie ? Parce que pour nous l'Italie n'est pas un pays qu'on visite en touriste, non c'est un sentiment... Et lorsque l'on quitte un sentiment, on ne le retrouve plus, on ne fait que visiter des villes, on ne rencontre plus que des pierres et des gens.
Sándor Márai, le miracle de San Gennaro
Si toute vérité porte en elle son amertume
S'il est vrai que toute vérité porte en elle son amertume, il est aussi vrai que toute négation contient une floraison de « oui ».
Et ce chant d'amour sans espoir qui naît de la contemplation peut aussi figurer la plus efficace des règles d'action : au sortir du tombeau, le Christ ressuscitant de Piero della Francesca n'a pas un regard d'homme. Rien d'heureux n'est peint sur son visage - mais seulement une grandeur farouche et sans âme, que je ne puis m'empêcher de prendre pour une résolution à vivre. Car le sage comme l'idiot exprime peu.
Camus, Sous le Soleil
La veuve regarda le veuf
La veuve regarda le veuf, lui la regardait déjà depuis un certain temps. Ils avaient tous les deux de très beaux yeux, et les beaux yeux sont faits pour se rencontrer, même lorsqu'ils ont déjà versé des larmes et des larmes sur la tombe d'êtres chers.
Grazia Deledda, Le lierre sur l’arbre mort
La beauté à l’état solide
Les poissons sont de l’eau à l’état solide.
Les oiseaux sont du vent à l’état solide.
Les livres sont du silence à l’état solide.
Pascal Quignard
Quel sera votre Second Act ?
On ne peut pas revenir en arrière et changer le début, mais on peut commencer là où l'on est et…changer la fin.
Il y a une gigantesque déconnexion à l'œuvre dans la société. On nous dit qu’il y a une app pour ça, une pilule pour ça, une posture de Yoga pour ça, mais la vérité c’est que nous n’avons pas mis à jour nos outils intérieurs de fabrication du sens et de connaissance de soi, y compris au travail, face à une société et des phases de vie qui ont radicalement changé.
Découvrez Second Act, mon cabinet de transition de vie, un passeport de sérénité pour la deuxième partie de vie.
Découvrez également le Parcours Edge-AWRNSS à destination des Entreprises.
Les Screenthoughts de la semaine
Déloger la première impression
Vivre libre
N’écrase pas les chenilles (petit conseil éducatif)
Signe des temps et temps des signes
Vous n’aimez pas la boussole politique Française ?Vous n’êtes pas prêts pour la boussole politique US (lire l’excellent article qui va avec).
L’épidémie de solitude en data par les fous furieux de The Pudding
L’exposome est un concept récent mais fondamental en santé publique et en épidémiologie. Il désigne l’ensemble des expositions (chimiques, biologiques, physiques, sociales, comportementales, etc.) auxquelles un individu est soumis tout au long de sa vie, depuis la conception jusqu’à la mort, en dehors de son génome. Une nouvelle frontière pour la santé ?
The economist pose la question vertigineuse : à quoi sert Accenture à l’ère de l’AI ?
Si vous êtes nostalgique de Twitter des années 2015-2016 il y a encore le fil Substack
Le livre sur la Chine (plus précisément sur Xi Zhongxun le père de Xi Jiping) dont tout le monde parle.
“J’ai ouvert l’AI aux secrets de l’univers….” Unexpected Consequences de l’IA : l’inflation spirituelle.
La Santé mentale produit dérivé de l'hypercapitalisme financier via la pathologisation de l’individu ? La réponse du Docteur Mathieu Bellahsen, psychiatre : “la Santé Mentale individualise des choses qui permettent de ne pas remettre en question le cadre.” CQFD.
C’est tout pour cette semaine, je vous retrouve la semaine prochaine avec le retour des mystérieuses et magnifiques “phrases de presque.”
D’ici là, comme toujours, gardez le cap 🧭.
Waloyo Yamoni, nous surmontons le vent.
Patrick Kervern, défadeur en chef de Umanz
Cette newsletter est avant tout un projet de coeur. De nombreuses personnes et sociétés me demandent souvent : comment travailler ensemble ? Actuellement, je consacre 80% de mon temps à “Second Act”, mon cabinet d’accompagnement en transitions pro ou perso. 10% de mon temps à des Keynotes en entreprise sur les Soft Skills élégants: les secrets de l’audace, la curiosité, l’esprit du débutant, l’émerveillement, l’impact, la loyauté, l’art de la conversation etc. Ainsi que des ateliers et séminaires exclusifs pour les comités de direction. Et 10%, par pur plaisir, à une activité de conseil en positionnement et en identité d’entreprise que j’ai gardée de mes anciennes activités chez Google, Reuters et Dow Jones. Elle me permet de produire, pour les marques et les entreprises des positionnements ou des contenus uniques, aussi différenciés que des guitaristes punks dans un orchestre de mariachis.
Je médite ce que tu dis car ta phrase est belle aussi(j'adore Palahniuk). On s'en reparlera 😉
Je suis abonné à votre Substack depuis quelques temps. C'est un bonheur de vous lire, chaque fois, merci pour cela.